L’avenir du Negresco, l’un des palaces les plus connus au monde et objet de toutes les convoitises depuis que sa propriétaire de 95 ans est sous tutelle, se jouera désormais devant la justice à Marseille, a-t-on appris auprès de l’avocate du comité d’entreprise.
Confirmant une information de Nice-Matin, Me Candice Guigon Begazi a indiqué que « le premier président de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, auquel le comité d’entreprise avait écrit, a décidé en début de semaine de dépayser le dossier devant le tribunal de commerce de Marseille ».
« Ce n’était plus possible d’imaginer que le tribunal de commerce de Nice continue à gérer ce dossier », a-t-elle ajouté.
En pleins remous sur le mode de gouvernance de l’hôtel, où travaillent environ 170 salariés, Le Canard Enchaîné avait révélé fin 2017 comment le président du tribunal de commerce niçois avait convoqué le directeur salarié de l’hôtel, Pierre Bord, pour une conversation officieuse que ce dernier, sidéré, avait discrètement enregistrée et fait transcrire par huissier.
« C’était fort maladroit et malvenu, je reste extrêmement choqué », a rappelé à l’AFP M. Bord, aux manettes de l’hôtel depuis 2011 et très soulagé d’apprendre le dépaysement du dossier à Marseille. « Au milieu de ces carabistouilles, comment avoir confiance dans un monde où on essaie de vous soudoyer ou de vous soutirer des informations ? », a insisté celui qui s’apprête à annoncer l’arrivée d’un nouveau chef pour le restaurant double étoilé de l’hôtel, Le Chantecler.
L’hôtel, un établissement Belle Epoque emblématique de la Promenade des Anglais où le Jazz Fest de Nice a fait ses premières armes en 1948, est géré par une administratrice judiciaire, Me Nathalie Thomas, depuis 2013 et le placement sous tutelle de la propriétaire Jeanne Augier.
Me Thomas avait été nommée quand la justice avait commencé à soupçonner des manoeuvres autour de Mme Augier pour capter l’hôtel. Un administrateur, Pierre Couette, trentenaire et spécialiste d’histoire de l’art, avait été mis en examen pour abus de faiblesse.
En raison de sa renommée, l’hôtel, actuellement d’une faible rentabilité, pourrait valoir entre 300 millions et 400 millions d’euros, estimait en 2016 Me Thomas. S’y ajoutent le mobilier et les oeuvres d’art aux styles éclectiques accumulés par Mme Augier, collectionneuse compulsive.
Il est le dernier palace familial de l’Hexagone resté français, contrairement à divers grands établissements notamment cannois, comme le Carlton ou le Martinez, passés sous capitaux qataris.