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La Silicone Valley a ses GAFA, les Français ont leurs KHOL. Les grandes enseignes de luxe hexagonales continuent à réaliser des bénéfices records, portés notamment par la croissance du marché asiatique et l’appel d’air créé par le Brexit. L’avenir semble au beau fixe.
Pour les grandes maisons françaises, l’année 2018 aura été celle du triomphe.
En 2018, Kering a enregistré une progression historique de 29,4%, pour 1,3 milliard d’euros de résultat opérationnel courant. Aussi, la direction du groupe a célébré une « année exceptionnelle » lors de son dernier bilan.
La maison Hermès, qui a fait le choix de ne commercialiser que les produits de sa marque éponyme, a également connu une croissance à deux chiffres (10%) et une rentabilité opérationnelle de l’ordre de 34 %. Cette belle performance a permis au groupe de se faire une place dans le CAC 40.
Les ventes de LVMH ont augmenté de 10% alors que son bénéfice net connaissait une hausse de 18%, ce qui lui a permis de dépasser la barre symbolique des 10 milliards d’euros. Le groupe est devenu la première capitalisation de la Bourse de Paris et devrait connaître de belles années à venir.
Des performances qui font dire à certains que le secteur du luxe et de la beauté en France a encore de beaux jours devant lui.
Le luxe à l’épreuve de toutes les tempêtes
Le secteur affiche un dynamisme largement supérieur aux tendances du marché. Les KHOL bénéficient en effet d’un très fort ancrage local, contrairement à leurs comparses du digital, qui profitent de la mondialisation. Ainsi, LVMH a recruté 14 300 personnes en France en 2018, dont 5 000 créations de postes. Le groupe paie 1,25 milliard d’euros d’impôt sur les sociétés.
De même, l’Oréal réalise 25 % de sa production dans l’Hexagone – pour seulement 7 % de son chiffre d’affaires. Le géant des cosmétiques, qui a réalisé sa plus forte croissance depuis 2007, aura pour sa part déboursée près d’un milliard d’euros d’impôts en France pour l’année 2018.
La fin d’année aura été pourtant mouvementée pour la France. Le mouvement social des gilets jaunes a en effet terni la « cote d’amour » de la capitale française. Mais le secteur du luxe est resté indemne. « En 2018, le marché de l’immobilier de luxe français a joué pleinement son rôle de valeur refuge pour des acquéreurs nationaux comme internationaux », note également Laurent Demeure, président de Coldwell Banker France & Monaco. « Paris reste une ville très attractive pour les investisseurs », confirme une étude du CBRE, qui se réjouit que « l’offre de biens de qualité fait face à une demande toujours plus importante ».
Cette imperméabilité à la crise est en grande partie due à la solidité structurelle du réseau de distribution de ces grands groupes. « A Paris, on a un peu perdu, forcément, une clientèle touristique, mais qu’on a retrouvé en Grande-Bretagne ou en Italie. Tout cela est une question d’équilibre et de capacité à absorber les chocs », résume ainsi le président d’Hermès, Axel Dumas.
Même la grande incertitude liée au Brexit n’aura pas affecté le secteur du luxe, notamment l’immobilier de très haut de gamme. Ce dernier a connu sa meilleure performance en 10 ans porté par le retour de nombre d’expatriés. « Nous avons des familles françaises qui préparent l’éventualité de déménager suite à la fermeture d’un bureau à la City ou ailleurs » souligne à ce propos la directrice de Junot Fine Properties, Alison Ashby, à propos des Français vivant à Londres.
Un marché asiatique en plein boom
Le luxe bénéficie à plein du développement des classes moyennes en Asie, en particulier de la clientèle chinoise. Ce phénomène est grandement facilité par le développement soutenu du e-commerce, qui place tout produit à portée de « clic ».
Selon une étude du Boston Consulting Group, le marché chinois regroupera d’ici à 2024 40% des clients du luxe mondial. Dans le même temps, il contribuera à hauteur de 70% de sa croissance. Les ventes de produits de luxe comme Lancôme, Armani, Yves Saint Laurent ou Kiehl’s y ont d’ailleurs bondi de 14,4 % sur l’année.
« Les ventes sont restées extrêmement dynamiques auprès de la clientèle chinoise au quatrième trimestre, il n’y a pas eu de ralentissement », affirme Jean-Marc Duplaix, directeur financier de Kering. Une conclusion qui trouve ses échos chez Ruder Finn Asie : « Ce qui est resté inchangé au cours des dix dernières années, c’est que la Chine et les consommateurs chinois sont sur une trajectoire globalement ascendante », explique Gao Ming, Directeur général des pratiques nationales du luxe pour la Chine du groupe.
L’embellie du luxe ne semble donc pas prête de s’arrêter.