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Attirer une clientèle exigeante et sophistiquée, encourager la création artistique, contribuer au rayonnement de la France… tels sont les objectifs de ces ambitieux partenariats entre les hôtels de luxe et l’art contemporain.
« L’art au quotidien est un luxe que les grands hôtels cherchent désormais à offrir à leurs clients », expliquait en 2016 Didier Moine Delalande, directeur de l’hôtel Le Mathurin, dans le huitième arrondissement de la capitale.
Quelques années plus tard, la tendance ne fait que s’accentuer. Les hôtels de luxe continuent de miser sur l’art contemporain pour séduire une clientèle de plus en plus sophistiquée et exigeante tout en encourageant la création. Mais attention, « il ne s’agit pas d’accrocher des œuvres en guise de déco, mais de développer un vrai espace de création », précisent Carine Tissot et sa mère, Christine Phal, directrices du Drawing Hotel.
Situé à 200 mètres du musée du Louvre, cet établissement unique est à la fois un hôtel, une galerie d’art, un bar et une librairie. Entièrement consacré au dessin, il attire amateurs et collectionneurs afin de promouvoir les échanges et la découverte.
Idem pour le Yooma Urban Lodge, dans le quinzième arrondissement. Conçu par les artistes Daniel Buren et Ora-ïto, ce nouveau concept hôtelier se veut « un espace de création artistique, culturel et design ». Trois ateliers sont à mis à la disposition d’artistes invités qui, à l’issue de leur séjour, ont la possibilité de présenter leurs travaux « au regard des hôtes comme des Parisiens curieux ».
Car s’il s’agit bien d’élargir et de fidéliser la clientèle hôtelière, il est également question de contribuer à la notoriété des œuvres et des artistes et même de renforcer l’attractivité et le rayonnement de la capitale. « La France a longtemps été associée au patrimoine. Avec la concurrence d’autres destinations, notamment Londres, Paris est contrainte de se renouveler », explique Julie Eugène, « art concierge » au Royal Monceau.
Faire de chaque couloir « une œuvre d’art pérenne »
Les artistes sont dès lors invités à imaginer des installations, des expositions ou des résidences afin de s’inscrire dans la vie de l’hôtel. C’est d’ailleurs à cette condition qu’ils acceptent de jouer le jeu. « Au début les artistes sont hésitants à l’idée d’exposer dans un hôtel. Mais ils sont rassurés quand ils ont face à eux une personne de confiance, plutôt qu’une interface corporate, et qu’ils savent que ce sera une exposition réfléchie », analyse la curatrice Constance Breton. « C’est une façon de toucher un autre public, ce qui est profitable aux artistes », ajoute-t-elle.
Résultat, toutes les grandes marques s’y mettent, en s’efforçant bien sûr de se distinguer et d’offrir une expérience inégalable. En 2008, Le Meurice a créé son désormais célèbre Prix Meurice pour l’art contemporain, qui récompense un(e) jeune artiste et sa galerie.
L’abbaye royale de Fontevraud, en Anjou, propose de son côté une programmation culturelle ouverte à tous les publics : résidences d’artistes, expositions, spectacles, installations, concerts… Le Molitor, dans le 16e arrondissement parisien, se propose quant à lui de perpétuer l’histoire de ce territoire d’art classé aux monuments historiques. Si le site dispose d’une collection de lithographies numérotées d’artistes de renom, il a également inauguré une résidence d’artistes liés au street art.
Au Drawing Hotel, les immenses dessins du Japonais Keita Mori côtoient les créations de cinq autres artistes ayant pris carte blanche pour faire de chaque couloir « une œuvre d’art pérenne ». On est loin, en effet, du simple accrochage de tableaux. Les hôtels de luxe veulent offrir à l’art contemporain de nouvelles possibilités de création et de nouveaux espaces de diffusion.