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Si la figure du joaillier évoque immédiatement bijoux et parures ornés de pierres précieuses et de métaux nobles, celle du boîtier, moins commune, est susceptible d’interloquer ; c’est pourquoi elle retient toute notre attention. Au premier abord, cette dénomination suggère un artisan spécialisé dans la conception et la fabrication de boîtes diverses, dont la préciosité et la complexité ne sont pas précisées. Selon le dictionnaire de l’Académie française (9e édition), le terme de « boîtier » était déjà en usage au XIIIe siècle pour désigner un « fabricant de boîte ». Qu’en est-il aujourd’hui, quelle est la pratique d’un joaillier-boîtier ?
Donner naissance au rêve,
Pour être plus précis, “boîtier” est une spécialité rare que le joaillier peut embrasser et qui le rapproche de l’orfèvre. L’un de ces représentants les plus fameux était Peter Carl Fabergé. Plus généralement, le joaillier-boîtier donne vie à des objets éclectiques, tous méticuleusement conçus dans les métaux et pierres les plus précieux. Il sublime également des matériaux plus surprenants tels que l’obsidienne, le jade, le lapis-lazuli, le cristal de roche ou encore la météorite. De l’épée d’académicien aux pendules mystérieuses, en passant par une cage aux oiseaux qui jouent les automates, chaque création repousse les frontières de l’imagination.
Les projets naissent de demandes de maisons de renom telles que Dior, Cartier ou Van Cleef and Arpels, ou bien de l’initiative de clients privés. Chaque création sur mesure constitue un défi, qui résulte d’une collaboration entre client et artisan, évoluant au gré des contraintes techniques et des solutions innovantes apportées. Grâce à l’utilisation de scanners, d’imprimantes 3D et de machines à commande numérique, le savoir-faire ancestral prend une nouvelle dimension. Ainsi, le métier de joaillier-boîtier incarne une fusion harmonieuse entre héritage et avant-garde, où chaque pièce devient le témoignage d’une expertise artisanale alliée aux exigences du luxe moderne.
Se faire chef d’orchestre pour un chef-d’œuvre,
Pour mener à bien un tel projet, les joailliers-boîtiers deviennent les maîtres d’œuvre de la conception de ces objets exceptionnels. Tout au long du processus, de nombreuses recherches enrichissent le cheminement créatif. Les joailliers-boîtiers supervisent une équipe, impulsant et organisant les synergies entre les différents métiers impliqués dans la fabrication. Du lapidaire au brodeur, en passant par les ébénistes, jusqu’aux écaillistes, chaque expert contribue à la création. Le joaillier-boîtier lui-même se consacre particulièrement au sciage, limage, soudage des métaux, préparant le terrain pour les étapes suivantes. Ainsi, passant de main en main, un objet important peut nécessiter une année entière de travail, parfois plus.
Si votre curiosité est désormais piquée, il ne sera pas aisé de la satisfaire car la plupart de ces créations demeurent confidentielles, appartenant à une sphère d’hyperluxe où la discrétion est de mise et les noms protégés. Elles revêtent une concentration de savoir-faire et une sublimation des matériaux qui leur confèrent une valeur inestimable, transcendant leur simple utilité pour gagner le statut de véritables œuvres d’art.
Dans le paysage contemporain, le luxe se distingue par une diversification croissante en matière de matériaux, de techniques et de formes. Pourtant, parallèlement à cette évolution, le processus de mondialisation du luxe entraîne une raréfaction des matières premières, accentuant ainsi le caractère extraordinaire voire excentrique de ces créations.
Image d’ouverture:
Œuf en lapis-lazuli attribué à P.C.Fabergé
Légende : Attributed to Peter Carl Fabergé (Russian, 1846 – 1920) Attributed to House of Fabergé (Russian, 1842 –1918). Russia, St. Petersburg. Gold, enamel, lapis lazuli, pearls, diamonds, rubies. Oral: 5.9 x 4,5 cm (2 5/16 x 1 3/4 in.). The India Early Minshall Collection 1966.436
Source : https://clevelandart.org/art/1966.436