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Un vent de responsabilité souffle sur les Maisons de Luxe. Le mouvement RSE semble s’être confirmé cette année, notamment suite à l’arrivée de Stella McCartney, pionnière de l’engagement environnemental, au sein du Groupe LVMH. Face à une exigence éthique croissante chez la clientèle, les acteurs du luxe entreprennent leur révolution.
Stella McCartney, le modèle à suivre
Raphia, coton bio, fausse fourrure, le défilé présenté fin septembre lors de la dernière Fashion Week donne le ton. Militante écologique de la première heure dans l’industrie de la mode, Stella McCartney monte d’un cran avec une collection des plus durables et écoresponsables de sa carrière. Tout ceci, un peu plus d’un an après avoir quitté le groupe Kering de François Pinault pour rejoindre le groupe concurrent de Bernard Arnault. Une décision remarquée dans l’industrie du luxe, et plus que significative dans la compétition opposant les deux groupes français. Riche d’une nouvelle maison dirigée par une créatrice ouvertement éco friendly, LVMH prend le lead du mouvement écoresponsable dans une fashion sphère défiée par les questions environnementales. Une bonne opération pour Bernard Arnault.
Celle qui depuis longtemps bannit fourrures et cuirs de ses collections devient à présent le symbole de l’écoresponsabilité dans le monde de la mode. Stella McCartney est la voie du changement, l’exemple d’une marque et d’une créatrice respectueuse de l’environnement, une tendance que compte bien généraliser LVMH au sein de son groupe. Une nouvelle direction dont la fille de Paul McCartney, tout juste nommée conseillère spéciale du comité exécutif sur le développement durable du groupe, sera la grande prêtresse. Son influence est déjà notable, quelques jours avant son défilé : LVMH dévoilait aux dirigeants du groupe sa nouvelle charte relative au bien-être animal dans l’approvisionnement des matières premières.
L’écoresponsabilité, une nécessité imposée par le marché
La vague verte écoresponsable déferle sur les marques. Une évolution logique étant donnée la poussée et le poids des millennials sur le marché. Moteurs de la croissance du luxe et bientôt majoritaires parmi sa clientèle, les acheteurs issus des générations Y et Z se révèlent plus sensibles aux préoccupations environnementales que leurs ainés. La question climatique impacte le marché, et change la demande. A l’heure où la mode est pointée comme l’un des secteurs industriels les plus polluants, durabilité et éthique sont pour les millennials des critères déterminants. Des critères se répercutant directement sur le choix des marques lors de l’achat. Preuve en est le succès du marché du luxe de seconde main dont les millenials sont les principaux acheteurs et vendeurs, un phénomène qui s’inscrit clairement dans une tendance durable chez le consommateur et la cible visée.
Les maisons de luxe doivent prendre le train en marche. Face à cette nouvelle donne difficile à ignorer, il faut repenser l’offre mais également la stratégie laquelle doit désormais intégrer les considérations durables dans chaque pan de sa conception. Un impératif d’image mais aussi de chiffre d’affaires. Ceux qui s’y refuseraient s’exposeraient à l’opprobre de leurs clients et de l’opinion.
Point de green washing cependant, l’heure est venue d’entreprendre des changements structurels. Le public exige à présent un devoir d’exemplarité impliquant de réelles actions, visibles et vérifiables. Une donnée contraignant les marques à une stratégie et à une communication axées sur une transparence maximale de leurs initiatives. On observe d’ailleurs une augmentation rapide des initiatives durables et de politiques RSE.
La RSE au centre de la stratégie des marques
La révolution s’organise donc. Fidèle à elle-même, Stella McCartney montre l’exemple une nouvelle fois et conclut un partenariat avec le géant du luxe d’occasion TherealReal, embrassant ainsi l’économie circulaire. Du côté de chez Prada, on opte pour l’utilisation de l’Econyl, un nylon unique en son genre, créé par recyclage de filets de pêche, déchets plastiques et résidus de fibres. La maison italienne a également contracté un prêt écoresponsable de 50 millions d’euros, dont les taux d’intérêts seront réajustés en fonction de l’atteinte ou non de plusieurs objectifs de développement durables définis au préalable par Prada et le Crédit Agricole. La somme servira à financer des projets écoresponsables menés dans le cadre de la stratégie RSE de la marque. Chez Kering, on s’engage à une réduction de 50% de toutes les émissions de gaz à effet de serre, d’ici 2025. Le groupe de François Pinault s’allie également avec l’Institut Français de la mode dans le cadre d’une nouvelle chaire Sustainability, ayant pour but de créer un pôle de recherche et d’enseignement intégrant l’ensemble des aspects du développement durable et de la RSE.
Le changement s’opère également sous haute surveillance étatique. En août dernier, c’est une nouvelle en provenance des hautes sphères qui vient agiter le secteur quand François Pinault, missionné par Emmanuel Macron, présente le Fashion Pact. Un projet visant à réduire l’impact de la filière sur le climat d’ici 2030 et 2050. Plus de 30 signataires comprenant notamment Kering, Burberry, Chanel, Prada ou Hermès se joignent à la charte. Une belle initiative qui ne prévoit cependant aucun mécanisme de sanction à ceux qui ne respecteraient pas les termes du pacte ou même aucune obligation d’adhésion pour ceux qui n’auraient pas signé celui-ci, pointent certaines ONG. Mais la sanction pourrait bien venir des consommateurs, de plus en plus exigeants quant à la responsabilité des marques. Car, « quand 20-30 % des acteurs sont mobilisés, c’est un point de bascule qui fait que les entreprises restantes n’ont plus d’excuses pour ne pas agir » explique d’ailleurs Baptiste Perrission-Fabert, directeur de cabinet de Brune Poirson, secrétaire d’Etat auprès de la ministre française de l’Ecologie. La loi anti gaspillage, porté par ce dernier pour favoriser une économie circulaire, devrait également venir renforcer le mouvement, en interdisant notamment la destruction de vêtements.
Un volontarisme gouvernemental et des mesures législatives bienvenus qui aideront à porter et soutenir sur la durée cette révolution verte dans tous les secteurs industriels.