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S’il y a une information à retenir de l’été 2023 pour l’économie du luxe, c’est bien le rachat de Capri Holdings par Tapestry. Un rachat qui n’a rien d’anecdotique puisqu’il affirme les ambitions de Tapestry. Le groupe américain entend bien se positionner sur le marché du luxe mondial. Et il souhaite à terme rivaliser avec les groupes tricolores, qui dominent grâce à leurs vastes portefeuilles de marques. Les groupes de luxe français doivent-ils trembler pour autant ?
Tapestry, le groupe de luxe américain en pleine ascension
Cet été, Tapestry a donc annoncé son intention de racheter le groupe de luxe Capri Holdings. Il met ainsi la main sur deux joyaux du luxé américain : Jimmy Choo et Michael Kors. Mais Tapestry récupère aussi dans son portefeuille la prestigieuse marque italienne Versace.
La raison d’un tel investissement ? Tapestry n’est pas sans savoir que la polarisation du marché mondial du luxe s’est accélérée ces dernières années. Et la montée en gamme de son activité est incontournable pour assurer son succès économique. Avant le rachat, Tapestry ne pouvais se targuer que de marques premium à l’aura pourtant modeste : Kate Spade ou Coach ne rivalisent pas avec les grandes marques européennes. A l’inverse, Versace, Jimmy Choo et Michael Kors sont des marques bien implantées au niveau international. Et elles permettront à Tapestry de consolider son assise dans l’univers du luxe.
Marché mondial du luxe en 2023 : une polarisation toujours plus marquée
Depuis le début d’année 2023, les mouvements n’ont pas manqué pour renforcer la polarisation sur le marché mondial du luxe. En juin dernier, Kering a racheté le parfumeur britannique Creed. Puis en juillet, le groupe a pris 30% de participation au sein de Valentino. En Italie, les maisons Prada et Zegna ont fait front commun pour prendre 30% de participation dans le capital de leur fournisseur Luigi Fedeli e Figlio. Plus que jamais, les groupes et maisons de luxe sécurisent leur activité en cultivant les alliances puissantes.
Le cas particulier du marché du luxe aux Etats-Unis
Alors en quoi le rachat de Capri par Tapestry est-il un signal différent ? Parce qu’il semble bien que le marché américain du luxe entre dans une nouvelle dynamique. Jusqu’à présent, l’économie américaine a eu du mal à accoucher de grands groupes de luxe dans la mode et la beauté. Pire : certains joyaux américains sont passés sous pavillon étranger. C’est notamment le cas du joaillier Tiffany, racheté par le géant français LVMH.
Peut-on y voir une réaction ? Ce qui est certain, c’est que depuis la pandémie, l’économie du luxe est plus que jamais tributaire d’un environnement en mutation. Il ne suffit plus d’être une marque célèbre pour bien performer. Et la désirabilité d’une maison de luxe se mesure désormais à sa capacité à se positionner sur une vision plus lifestyle. Pour cela, les maisons de luxe affichent haut leur dimension patrimoniale. Un jeu dans lequel les maisons françaises sont passées maîtres. Et pour cause : elles ont pour la plupart conservé leur indépendance face aux groupes étrangers.
Les groupes américains en ont visiblement tiré la leçon. En novembre dernier, le groupe Estée Lauder a racheté la marque Tom Ford. Un premier coup de semonce pour le marché mondial du luxe. Et le rachat de Capri par Tapestry s’inscrit donc dans cette continuité.
Quel impact pour les autres groupes de luxe ?
Alors que la polarisation de l’activité luxe devient plus visible aux Etats-Unis, à quoi faut-il s’attendre ? Pour l’année 2022, le cumul des chiffres d’affaires de Tapestry et Capri Holdings atteint 12 milliards de dollars. On est bien loin des résultats de LVMH, leader mondial avec 79 milliards de dollars.
Dans l’immédiat, la consolidation de l’activité luxe de Tapestry ne devrait pas changer radicalement la donne. Toutefois, un constat s’impose : le marché mondial du luxe devient toujours plus compétitif. Une réalité qui n’a pas échappé à Kering. Le 30 août dernier, le groupe de luxe français a annoncé qu’il contractait un emprunt de 3,8 milliards d’euros. L’objectif ? Accroître la flexibilité financière du groupe qui est en pleine phase de restructuration. Outre le rachat récent de Creed, Kering compte investir sur le segment porteur de la beauté de luxe.