|
|
En 2019, le hackathon s’est démocratisé dans l’industrie du luxe. En octobre dernier, Kering a mis en jeu pas moins de 18 000 euros pour récompenser les gagnants d’un hackathon sur le thème du luxe durable. Une pratique qui n’a plus rien de surprenant. Au contraire : les groupes de luxe ont de plus en plus recours au format hackathon pour faire émerger de nouvelles solutions en matière de supply chain, d’éco-conception… et même de créativité.
Longtemps l’apanage des start-ups et des entreprises spécialisées dans la communication et les nouvelles technologies, le hackathon s’installe à présent dans le paysage de l’industrie du luxe. Le concept reste inchangé : les entreprises invitent les jeunes talents rassemblés en équipes à participer à un think tank à huis clos et en temps limité (24 ou 48 heures), pour trouver des solutions à un problème concret. Le but ? Faire émerger des idées innovantes, adaptables sur le terrain, et résoudre plus rapidement les problématiques internes.
2015 : Louis Vuitton lance le 1e hackathon dédié au luxe
Il y a peu, ce type de pratique était encore étrangère au monde du luxe. Mais tout a changé en septembre 2015, lorsque le groupe LVMH a organisé le tout premier hackathon dédié à l’univers du luxe. L’événement avait pour thème Unlock the Future of Luxury, et il était ouvertement orienté vers l’intégration des logiques de data mining dans la stratégie commerciale des marques de luxe. Les 58 candidats ont ainsi planché sur la création d’une application capable d’analyser le comportement client pour faire émerger des tendances et des modèles prédictifs. Plus concrètement, l’idée était d’imaginer un outil capable d’anticiper les évolutions du marché du luxe, pour accompagner l’animation commerciale. Anticiper les tendances de ventes ? Un rêve soudain à portée de main pour les marques de luxe.
Kering et LVMH : les groupes de luxe investissent dans les hackathons
En 2019, le nombre de hackathons lancés par des groupes ou des marques de luxe a même largement augmenté. Les grands groupes de luxe, LVMH et Kering, sont les premiers artisans de cette tendance. Ils ont tous deux organisés plusieurs événements, tous sur des problématiques actuelles auxquelles l’industrie du luxe est confrontée : mise au point de solutions digitales pour évaluer l’impact des produits de luxe sur l’environnement, personnalisation des cosmétiques grâce à l’impression 3D, améliorer la gestion de la supply chain…
Et le montant des dotations augmente à mesure que les groupes investissent dans ce format de recherche. Pour son dernier hackathon, Kering avait généreusement doté les gagnants : 10 000 euros pour l’équipe gagnante, 5 000 euros pour la seconde, et 3 000 euros pour la troisième.
Moncler et Burberry : le luxe réinvente le modèle du hackathon
Le 3 juillet 2019, Moncler a inauguré son tout premier hackathon, sous la forme d’un concours interne. La marque a réuni 450 de ses employés à Milan, pour un marathon d’innovation de 24 heures. Pour Remo Ruffini, le PDG de Moncler, le hackathon est aussi un outil managerial qui rassemble les équipes. Dans son discours inaugural, il constatait que « Les solutions reposent rarement sur un seul esprit, la culture de l’innovation repose sur notre capacité à travailler tous ensemble. » De fait, le hackathon a mobilisé toute l’entreprise Moncler. Le jury a sélectionné les quatre meilleurs projets, mais ce sont les 4 155 employés de Moncler à travers le monde qui ont ensuite voté pour le gagnant.
Pour Burberry en revanche, le hackathon est l’occasion de s’intéresser non seulement aux aspects techniques de la chaine de production, mais aussi à la dimension créative. En 2019, Burberry a lancé un hackathon sur le thème du « Trench Coat du Futur ». Les équipes devaient plancher sur de nouveaux moyens de production, mais aussi de nouveaux designs. L’occasion de repérer les talents émergents.
Quel retour sur investissement pour les hackathons de luxe ?
Les hackathons sont désormais à la mode. Mais leur impact réel sur la stratégie des marques de luxe est difficile à quantifier. La mise en pratique des solutions identifiées lors de ces concours n’est pas systématique. Prada en a fait l’expérience avec son hackathon raté de 2018. La maison italienne avait invité des étudiants de l’Ecole de Management de l’Université de Yale et de l’Ecole Polytechnique de Milan. Mais aucun des projets proposés, y compris de gagnant, n’a débouché sur une solution pratique.
L’intérêt du hackathon n’en est pas moins évident pour les marques de luxe. A l’heure où la course au développement durable est lancée, le format agile et rapide du hackathon ne manque pas d’intérêt. La preuve avec Burberry. La marque a déjà lancé une étude pour développer le projet vainqueur de son hackathon. La maison britannique travaille actuellement à un nouveau processus de tannage qui utilisera 70% d’eau de moins qu’un tannage standard. Cette nouvelle méthode pourrait être validée avant la fin d’année 2020.