La dernière fabrique de charentaises en Charente va fermer : le tribunal de commerce d’Angoulême a prononcé vendredi la liquidation judiciaire de La Manufacture Charentaise (LMC) à Rivières, qui laisse 104 salariés sur le carreau.
Placée en redressement judiciaire le 25 juillet dernier, l’entreprise n’avait fait l’objet que d’une seule offre de reprise que le tribunal a rejetée. Elle ne proposait que le maintien de 38 emplois.
La liquidation a été prononcée « avec effet immédiat », a précisé à l’AFP Henri Lalouette, dirigeant départemental FO qui suivait le dossier, dénonçant la « gabegie, l’incompétence et la négligence » des dirigeants qui ont conduit à cette faillite.
Présidée par Renaud Dutreil, ex-ministre du gouvernement Raffarin, qui détient la moitié des parts, LMC est le fruit du regroupement en 2018 de quatre fabricants, déjà mal en point, des célèbres chaussons charentais.
Selon une source proche du dossier, la société a subi en un an une forte baisse de son chiffre d’affaires – de 13 millions d’euros pour les quatre entreprises en 2018 à 7 millions – passant d’un résultat net positif de 1,3 ME à une perte de près de 700.000 euros en quelques mois.
Des problèmes de gouvernance, avec une direction en conflit interne, ainsi que des « mauvais choix de commercialisation », notamment en abandonnant trop rapidement ses ventes traditionnelles en grande surface pour se tourner vers le haut de gamme, expliquent notamment la dégringolade de l’entreprise, selon la même source.
LMC avait obtenu il y a moins d’un an un label qui garantit son savoir-faire, une « indication géographique » délivrée le 25 mars par l’Institut national de la propriété industrielle (Inpi). Ce label de la « charentaise de Charente-Périgord » est également détenu par l’entreprise Fargeot, qui fabrique toujours des charentaises mais en Dordogne voisine.
Née à la fin du XIXe siècle, la charentaise est issue des rebuts de fabrication des industries textiles et papetières situées sur le fleuve Charente. Les savetiers locaux ont eu l’idée de récupérer les feutres qui servaient au pressage pour en faire des chaussons, avec la languette caractéristique qui protégeait le pied du sabot de bois et la technique très particulière du « cousu-retourné » (semelle cousue et montée à l’envers, puis retournée).