Soixante canards de Challans sont prêts à rôtir, les fonds de sauce mijotent et la brigade de La Tour d’Argent piaffe d’impatience: le légendaire restaurant parisien rouvre ses portes jeudi après six mois de confinement.
Pour l’occasion, les gastronomes fortunés pourront déguster un « caneton de retrouvailles », recette inédite et encore secrète.
« Le 14 mars, l’annonce de la fermeture des restaurants a été un grand choc. A la fin du service, on a réuni la brigade. Nous étions dans un état de sidération… », confie à l’AFP André Terrail, dont la famille est depuis trois générations aux commandes du restaurant gastronomique, une ancienne hostellerie où Henri III adopta pour la première fois la fourchette.
Avec vue imprenable sur Notre-Dame, depuis le dernier étage d’un immeuble des bords de Seine, cette table fondée en 1582 (une étoile Michelin pour « une cuisine d’une grande finesse dans la tradition de la haute gastronomie ») a vu défiler d’innombrables personnalités, de Theodore Roosevelt à Vladimir Poutine en passant par Elton John, tous attirés par la recette maison du canard au sang.
Depuis lundi, les 65 membres du personnel, dont 30 aux fourneaux dirigés par le chef Yannick Franques, se sont retrouvés pour la première fois, « mobilisés pour recréer toute l’expérience de La Tour d’Argent ». Dans un premier temps, six services seront proposés, du jeudi soir au dimanche midi. A la carte, le « caneton des retrouvailles ».
« Comme tous les restaurants gastronomiques, les tables étaient déjà distantes de plus d’un mètre pour le confort de la clientèle. La distanciation est donc garantie, sans aménagement », ajoute le maître des lieux.
Pour le premier service jeudi, le restaurant sera complet, avec des réservations revenues rapidement, correspondant au niveau habituel de la rentrée.
« Nous sommes habitués aux règles d’hygiène. Les gestes barrière seront appliqués de façon la plus transparente. Le personnel portera des masques aux armes du restaurant », précise André Terrail.
« Pendant le confinement, les mesures d’aides d’Etat, dont le chômage partiel, ont été essentielles. On n’est pas sortis du tunnel. C’est difficile pour tous les restaurateurs… », ajoute-t-il, comptant sur 60 couverts par service.
Pour maintenir le contact avec la clientèle, la livraison de canards prêts à cuire jusqu’ici réservés au restaurant, a été mise en place pendant le confinement, tandis que la Rôtisserie de La Tour, dans l’esprit bistrot parisien, a créé un service en terrasse.
Dès le 15 juin, la Tour d’Argent a également proposé un service à domicile. Une prestation très haut de gamme à partir de 1.180 euros pour deux couverts, hors boisson mais avec cuisinier et maître d’hôtel.
Depuis mi-mai, la Tour d’Argent de Tokyo ne désemplit pas. « Les additions sont plus élevées que d’habitude, révélant l’envie de se faire plaisir », analyse André Terrail.