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Autrefois hantise des riziculteurs thaïlandais, des escargots géants sont désormais dorlotés pour leur précieuse bave, prisée par l’industrie cosmétique, notamment en Corée du Sud et aux Etats-Unis.
« Ce sont des fermiers qui me vendent les escargots. Avant ils trouvaient ces escargots qui détruisaient leurs récoltes et les jetaient sur la route ou dans des rivières », explique Phatinisiri Thangkeaw, enseignante reconvertie en éleveuse d’escargots pour arrondir ses fins de mois, de l’ordre de 10.000 à 20.000 bahts par mois (290 à 580 euros).
« Mais maintenant ils les vendent », ajoute-t-elle, après avoir donné du potiron et des concombres de son jardin à son millier d’escargots, entre deux grosses averses de mousson.
Située à deux heures de Bangkok, la province de Nakhon Nayok où elle habite est très rurale. Au total, ce sont plus de 80 fermiers qui y ont monté de petits enclos à escargots, à l’orée de leurs champs ou plantations.
Ils vendent chaque mois à une entreprise de cosmétiques thaïlandaise plusieurs litres de bave d’escargots, patiemment récoltée lors d’un processus de « traite » consistant à stimuler les glandes de l’escargot en lui faisant couler de l’eau dessus, à l’aide d’une pipette. La bave est ensuite purifiée dans un laboratoire d’Etat et commercialisée.
A l’origine du projet, Kitpong Puttarathuvanun, un ingénieur ayant eu le flair de fonder la firme cosmétique Aden, qui a le monopole du marché en Thaïlande. Il a eu l’idée d’utiliser ces escargots géants africains, Achatina Fulica, qui pullulent dans les rizières de Thaïlande, dont le climat humide en fait le paradis des gallinacées.
« Ils mangent de tout, même l’écorce des arbres et des champignons. Et cette capacité à manger de tout les rend forts. Et ils produisent une bave de très grande qualité qui peut être utilisée pour se protéger du soleil et guérir des blessures », assure Kitpong Puttarathuvanun.
« Le mucus d’escargot contient des substances importantes comme le collagène et l’élastine », explique le docteur Somkamol Manchun, experte du Thailand Institute of Scientific and Technological Research (TISTR), chargé du processus de purification.
Pour l’heure, aucune étude scientifique internationale n’est venue confirmer les vertus de ce produit « miracle ».
Kitpong commercialise son sérum sous la marque Acha, mais fournit aussi des marques coréennes et surtout américaines, auxquelles il le vend sous forme lyophilisée à 1,8 million de bahts le kilo (plus de 50.000 euros), plus que le cours de l’or.
Il est ensuite incorporé en dose infime dans des crèmes vantant ses vertus anti-âge. Le marché mondial des cosmétiques à base d’escargot est estimé à près de 280 millions d’euros, selon une étude de Coherent Market Insights.