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Aïssata
Haïdara
Les Carnets du Luxe vous emmènent à 3000 mètres d’altitude, dans les hauteurs des Alpes, pour vous faire découvrir Tanguy Michel, marque du créateur éponyme. Jeune designer indépendant, trouvant son inspiration parmi les monts enneigés, misant sur l’artisanat main avec une rigueur exemplaire, il vient de sortir sa nouvelle collection, baptisée Air+. En toute intimité, il s’est confié à nous.
Pouvez-vous nous décrire votre maison Tanguy Michel en un mot ?
Fraiche, ou givrée.
Comment vous est venue l’idée d’Air+, votre nouvelle collection ?
J’ai créé cette collection dans l’idée de m’aérer, je voulais reproduire la sensation du souffle d’oxygène pur venant de la montagne. J’ai imaginé des formes organiques offertes par la nature, ainsi que celles des skis sur les pistes. J’ai vu une arche dans la neige et cela m’a inspiré un sac, ce n’est pas un sac pratique mais un objet décoratif. La matière miroir utilisée comme signature reprend la réflexion du soleil sur les pistes. Je m’intéresse aussi à l’imperméabilité ainsi qu’à l’aspect fonctionnel et technique des tenues de ski. En bref, j’ai cherché, avec cette collection, à mettre en avant une vision « mode » de la vie à la montagne.
Quelle est la genèse de la création de votre marque ?
J’ai toujours voulu faire quelque chose d’artistique. Ayant grandi dans une station de ski, j’ai toujours été fasciné par les vêtements techniques de sports d’hiver. Après un BTS design et création à Marseille, j’ai créé ma marque en 2018, seul. Ce n’est que depuis décembre 2022 que j’y investi tout mon temps pour faire grandir ce projet.
Qu’est-ce qui a été le plus difficile au lancement de Tanguy Michel ?
Clairement, tout l’aspect administratif, tout ce qui n’est pas de l’ordre de la création pure. J’ai créé ma marque alors que j’étais toujours étudiant, tout en finançant les prémices de mes projets en travaillant à côté. Je suis indépendant et je gère l’intégralité de mon entreprise seul, sur le plan créatif bien-sûr mais aussi administratif ou commercial.
Votre environnement de travail enclavé, loin de la vie parisienne, représente-t-il un handicap ou une chance ?
Souvent, je me pose la question de me déplacer, ça bouge à Paris, il y a beaucoup d’opportunités, mais j’ai besoin des Alpes pour créer, de leur environnement hors du temps qui rend mon processus de création unique. Mes collections sont nourries par l’abondance de décors et de situations que je puise dans la montagne et nulle part ailleurs. C’est plus qu’un lieu de vie, c’est tout mon univers. A Paris, c’est le tourbillon incessant des nouvelles idées oui, mais le calme est un luxe peu accessible. J’ai besoin de ce calme, de ce recul.
Vous êtes très présent sur les réseaux, quel est votre rapport à ces outils de communication ?
J’utilise les réseaux sociaux pour être plus proches des potentiels consommateurs et créer une forme d’engouement autour de mon univers. Je partage ma passion et mon grain de folie à travers des videos où je me mets en scène et où je dévoile en partie mon processus de création. J’ai commencé sur TikTok, j’ai mis plusieurs vidéos et les gens ont adhéré, et par la suite j’ai eu plusieurs commandes. En 2023, l’engagement sur les réseaux sociaux est primordial pour les jeunes créateurs qui souhaitent faire connaître leur travail au plus grand nombre.
Anticipez-vous les flux de créations avant de poster des vidéos pour éviter de crouler sous les commandes ?
Pour l’instant je suis seul à bord, et j’essaie donc de gérer avec le plus de minutie possible mon organisation en réalisant en amont les pièces de ma collection permanente, et en fonctionnant par système de « drops » pour diffuser le reste en plusieurs parties, petit à petit.
Vos matières proviennent des restants de rouleaux des maisons de couture, n’est-ce pas une limite à la création, au nombre de pièces ?
Pour les pièces permanentes, les tissus sont commandés en mercerie en ligne, comme le simili cuir noir ou la matière miroir, pour qu’il n’y ait pas de rupture de stock. Pas de gaspillage chez Tanguy Michel, j’utilise les chutes de tissus pour créer les pièces uniques et limiter ainsi les pertes et mon impact écologique. Quand il n’y en a plus, il n’y en a plus ! Il n’y a pas de grosses quantités, on favorise l’exclusivité, les followers sont à l’affut des drops, pour avoir accès à une des créations éphémères. C’est aussi, pour moi, une façon de me démarquer de la fast fashion et de prôner la rareté des confections.
Vos fournisseurs viennent-ils d’Europe ou d’ailleurs ?
Oui, toutes mes matières viennent d’Europe.
Un conseil pour les nouveaux designers ?
Du courage pour toute la paperasse, il faut se lancer, bien s’entourer et surtout ne pas avoir peur !
Une information inédite à partager avec nous pour conclure ?
Je ne suis pas très couleur à part le bleu mais… il y aura peut-être de la couleur dans la prochaine collection !
Entretien dirigé par Charlie Boutemy
Photos : Tanguy Michel